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Rencontre avec les orques

  • Photo du rédacteur: Géraldine Danon
    Géraldine Danon
  • 9 avr.
  • 7 min de lecture

C’est en lisant le livre « Frère des orques », lors de la traversée de l’Atlantique qui nous ramène du Maine vers la Bretagne, que j’ai découvert l’existence de cette population d’orques dans les fjords de Norvège. Ils sont environ 700 qui viennent chaque année se nourrir dans la région de Tromsø, au nord du cercle polaire. Il y a plus de dix ans, ils sillonnaient la région des îles Lofoten, un peu plus au sud, et leur déplacement vers le nord serait dû au changement climatique et au réchauffement des eaux dans cette région.



Mais qu’est-ce qui attire ces mammifères marins, grands voyageurs, dans un secteur bien défini et si près des côtes. Les animaux, en général, sont animés par deux principes, se nourrir et se reproduire. Il y a donc une raison qui attire ces grands prédateurs à se concentrer dans ces fjords.


C’est un petit poisson d’environ 20 cm, argenté, qui vit en groupe de plusieurs centaines de milliers d’individus. Il s’appelle le hareng. Il est principalement pêché en Europe du Nord, de l’Irlande, de la France, jusqu’à la Norvège. Un poisson qui aime les mers froides. Le hareng est l'une des espèces les plus pêchées au monde. Ces fortes concentrations au moment du fraie ont de tout temps attiré les pêcheurs dans de vastes campagnes saisonnières de pêche. Cette espèce est exploitée intensivement pour la consommation humaine et accessoirement pour la fabrication d’huile et de farine destinées à l’alimentation animale (aquatique et terrestre).


Le principal pays pêcheur de hareng au monde est la Norvège. Le hareng est un poisson gras. Sa chair, tendre, possède une saveur caractéristique très intense. Outre ses nombreuses possibilités d'utilisation, le hareng est aussi très populaire grâce à sa forte teneur en acides gras oméga-3, bons pour la santé. Il est aussi très sain, car il contient une grande quantité de vitamines et de minéraux.


Depuis des temps anciens, l’orque a découvert ce rassemblement de harengs, entre le mois de novembre et le mois de février, dans les eaux norvégiennes. Le hareng vient se nourrir dans une eau à 7°C, pas plus, d’où sa migration lente vers le nord en suivant la température de l’eau. Lui aussi est là pour se nourrir de plancton, de larves de crustacés et lui permet de s’engraisser en préparant sa reproduction qui aura lieu en avril, lors de la fécondation des œufs libérés par les femelles. Il est alors bien gras, au meilleur de sa forme pour que le cycle annuel du mystère de la vie puisse se réaliser dans les meilleurs conditions.


Les familles d’orques, appelées des « pods », est un groupe matriarcal d’environ d’une vingtaine d’individus, masculin et féminin, mais dirigé par les femmes. C’est souvent une grand-mère, âgée d’une cinquantaine d’années, qui prend la direction de ce groupe. Elle enseigne aux plus jeunes les règles de vie, les techniques de pêche, les endroits où ils pourront trouver de quoi se nourrir et où ils pourront se reproduire. Les mâles restent également toute leur vie dans ce pod, ils auront le droit de s’en échapper pour aller courtiser une femelle d’un autre pod. Il y a quelques groupes sédentaires, comme en Colombie Britannique, au Canada, mais le plus souvent ils sont pélagiques, vagabonds, allant à la recherche de nourriture en parcourant les océans.


Ce rassemblement de Norvège est exceptionnel de par son nombres. Plus de 700 orques qui croisent dans des fjords au nord de Tromsø. Ils sillonnent les baies en quête de nourriture. Ils attendent le rassemblement de ces poissons en masse de plusieurs centaine de milliers. Des boules de nourriture. Il n’y a qu’à se servir. Ils partagent le festin avec des baleines à bosses. Il y en a pour tout le monde.



L’Homme vient aussi puiser son quota. De petits bateaux encerclent les poissons avec de grands filets. Trop lourd pour remonter à bord cette masse de milliers de poissons et de plusieurs tonnes, c’est un plus gros navire qui vient les aspirer pour les enfourner dans ses cales. Une industrie surveillée et règlementée.


L’équipage de Fleur Australe s’est préparé à cette rencontre. Équipés de combinaison étanche, palmes, masque et tuba, Géraldine, Loup et Laura, sont prêts pour se laisser glisser dans cette eau qui aujourd’hui avoisine les cinq degrés. Je reste avec Marion sur le pont pour conduire le bateau. Mais en ce début du mois de décembre, les journées sont courtes, le soleil ne dépasse plus l’horizon depuis le 15 novembre, et ce n’est que quelques heures de clartés, qui nous laissent la possibilité de cette rencontre.



Nous scrutons l’horizon avec les jumelles, dès les premières lueurs, pour apercevoir un aileron, un souffle. C’est Marion qui la première devine au loin le souffle d’une baleine. Un peu plus loin, un aileron impressionnant d’un mâle orque accompagné d’ailerons plus petits, des femelles. Ils avancent lentement dans cette eau encore noire. Nous observons leur navigation. Lentement nous essayons de nous en approcher. Ce premier contact nous laisse avec plein de questions. Ont-ils repéré des poissons ou sont-ils en balade et digestion ? Ils se déplacent à environ 6 nœuds, et nous pouvons encore les suivre. Nous avançons avec prudence à leur côté, mais il est encore tôt pour se mettre à l’eau. Nous préférons les observer et en apprendre un peu plus sur leur comportement. Le spectacle est magnifique. D’autres groupes, d’autres pods semblent aussi en chasse. Nous croisons des baleines, qui viennent participer au festin. C’est je crois le seul endroit au monde où l’on peut voir autant de concentration d’orques et de baleines. Marion a sorti sont hydrophone pour essayer d’entendre le clic des orques, un langage que l’Homme essaye de déchiffrer.


Son cerveau est le plus développé des mammifères marins. Dans l’hydrophone c’est le silence ou peut-être des ultra-sons que notre oreille ne peut entendre. L’orque a ses secrets de chasse. Nous passons notre courte journée, environ 4 heures à sillonner la baie, et admirer la balade des orques. La nuit revient vers 14h00. Il est temps de trouver un mouillage. Le temps est calme. À l’aube, vers 11h00, nous levons l’ancre pour partir à la chasse, pacifique ! Ont-ils continuer leur quête de nourriture ou trouvé une petite baie pour se reposer ? Ce matin la mer est d’huile. Un miroir où se reflète les montagnes enneigées. C’est l’hiver, tout est blanc, une belle couche légère qui épouse les forment variées de ce décor magnifique. Une chaîne montagneuse et ses pics acérées, laisse apparaître la roche noire. Tout est doux, calme, reposant, sans un bruit. La lumière qui arrive, accompagne lentement ce décor à se dessiner. Les régions polaires et leurs couleurs pastels si particulières aux hautes latitudes. Nous n’avions pas encore gouté aux nuits polaires. La clarté ne dure que quelques heures et la nuit durent une journée. Il faut vivre à un autre rythme. À bord, on s’occupe : lecture, musique, cuisine ou un jeu de cartes pour occuper le temps. Nous contournons une île à la recherche de nos amis. C’est Laura, armée de ses jumelles qui repère un aileron, au loin. La Fleur glisse sur le miroir. Il faut s’approcher avec respect vers ces animaux qui sont ici chez eux. Ils seront là le temps de se nourrir. Où iront-ils après ? On ne sait pas exactement. Les différents pods vont se séparer. Ils iront chacun dans une direction, Mer de Barents, Spitzberg, Groenland, Island, en quête de nourriture.


Autour de nous des baleines et des orques semblent s’être arrêtés. Géraldine se laisse glisser dans l’eau, Loup l’accompagne. Laura hésite, l’eau froide et ces « monstres marins » la fait réfléchir. Elle attendra la prochaine mise à l’eau, encore trop timide !


Loup s’éloigne pour aller à la rencontre des baleines. Difficile de raconter son émotion à la vue de cet animal de plus de quinze mètres de long et de 30 tonnes, à quelques mètres de lui. L’interaction est rapide, la baleine continue sa route avant de sonder. Géraldine a préféré suivre les orques, mais elle n’a fait que les apercevoir, trop loin. Leur nage n’a pas d’équivalence avec celle de l’Homme. Ils n’ont pas souhaité créer le contact. C’est eux qui décident. Ça sera pour une autre fois.


La situation la plus propice semble être le moment où l’orque se nourri de harengs. Dans ce cas, sa nage est plus lente et il prend le temps de croquer sa proie.


Nous ne sommes pas dans un parc aquatique, et les animaux sont en liberté. Ce sont eux qui décident et il n’y a pas de dresseur pour leur donner un ordre. Il est évident que nous préférons cette approche de la nature et condamnons ces parcs où un orque est enfermé dans une piscine de quelques dizaines de mètres de long, lui qui est habitué à nager dans un océan sans limite.


Tout le monde rentre à bord. C’est une approche difficile et c’est tant mieux. Géraldine trépigne, prête à repartir. Elle sait que cette relation avec un orque se fera. Elle respecte le choix de l’animal. C’est lui qui décidera.


Nos plongeurs se réchauffent avec un thé chaud dans la timonerie. Marion a l’œil fixé sur ses jumelles et fait le guet en parcourant l’horizon. Nos amis ont disparu. En quelques coups de nageoire, ils ont plongé, à la recherche d’une proie. Ce soir leur menu sera peut-être un loup de mer, une morue.


La lumière s’estompe. Il est quatorze heure, la nuit revient envelopper nos montagnes dans son habit de nuit.


Il nous faut regagner un mouillage, sous le vent d’une île, à l’abri. Demain une tempête de neige envahira la baie.


18h00

Nous sommes dans le carré à préparer le dîner quand Loup nous appel, « Venez voir ». Le ciel se met à s’éclairer avec une somptueuse aurore boréal. L’équipage monte sur le pont pour admirer cette magie de la nature, des flammes vertes, embrasent le ciel, virevoltent, disparaissent, reviennent encore plus belles, et dans un calme parfait, approche autour de la Fleur Australe, un groupe d’orques.



C’est leur souffle que l’on entend en premier et à quelques mètres apparaissent des ailerons, tels des ombres qui déchirent la surface de l’eau. Comme si ce tableau ne nous suffisait pas, nous entendons le souffle puissant des baleines qui viennent elles aussi nous rendre visite. Dans ce calme complet, c’est incroyable d’entendre la puissance d’une telle respiration. Des centaines de litres d’air expulsés par ce géant des mers. Nos amis s’éloignent et laissent en nous un plein d’émotions, de vibrations. Géraldine reste seule sur le pont pour communier avec les étoiles et le monde merveilleux que nous offre cette nature. Elle entend au loin le chant des baleines, sans doute pour nous laisser comprendre que la vraie vie se trouve dans les océans, elles nous appellent à venir les rejoindre.

 
 
 

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